Louis-Florimond Fantin des Odoards
Né à Embrun le 23 décembre 1778,fils d’Etienne-Florimond Fantin des Odoards, avocat à la cour, lieutenant de la juridiction archiépiscopale de l’Embrunois et subdélégué de l’intendant au département d’Embrun et d’Hélène Gerbier, il débuta sa carrière militaire le 19 juillet 1800 en qualité de sous-lieutenant dans la Légion vaudoise avant de prendre part aux deux campagnes d’Italie où il fut blessé une première fois et où il obtint les grades de lieutenant le 8 août 1800 puis de capitaine du 31° d’infanterie légère le 22 mars 1805. Sous le Premier Empire, il participa à toutes les campagnes de la Grande Armée où il se distingua par sa bravoure. Blessé une seconde fois en 1807 à Friedland, son courage fut à nouveau reconnu lors de la prise de Porto au Portugal. Il servit en Espagne de 1809 à 1811. Le 24 juin 1811 il devint Chef de bataillon dans les grenadiers à pied de la Vieille garde.
A Moscou, il est promu au grade de major au sein du 17° d’infanterie de ligne. En 1813 il reçoit des mains de l’Empereur la croix d’officier de la Légion d’Honneur avant d’être nommé à la tête du 25° d’infanterie de ligne en tant que colonel. Il est fait prisonnier lors de la capitulation de Dresde le 11 novembre 1813. Licencié de l’armée le 13 octobre 1814, il reprit du service à la tête du 22° de ligne durant les Cent Jours participant avec gloire à la bataille de Ligny. Rappelé le 14 avril 1819 par le ministre de la Guerre, le maréchal Gouvion-Saint-Cyr, il participa en 1823 à la Guerre d’Espagne qui opposa la France, chargée par la Sainte Alliance de rendre au roi Ferdinand VII son trône menacé par les libéraux espagnols. Il se distingua lors de la prise du pont de Molins de Rey où son cheval fut tué sous lui. Le 23 juillet 1823 il est nommé maréchal de camp. Gouverneur de Tarragone la même année, Inspecteur général de l’infanterie en 1825, il fit partie de la commission mixte de l’armement
C’est le gouvernement de 1830 qui le nomma membre du comité permanent de l’infanterie et de la cavalerie, fonction qu’il exerça de1832 à 1834, puis membre du jury d’examen de l’Ecole militaire de Saint-Cyr et de la commission d’état-major de 1835 à 1838.
Retiré à Saint Leu-Taverny, dans la réserve le 24 décembre 1840, il prit la tête de la Garde nationale du canton composée des bataillons de Montmorency, Deuil, Saint-Leu et Taverny.
Sa propriété s’ouvrait sur la rue de l’Ermitage avec un débouché sur la Grande Rue, notre actuelle rue du Général Leclerc, à proximité d’un kiosque en treillis de bois aujourd’hui disparu. Il semble que, depuis ce belvédère, le général guettait l’arrivée de la diligence pour Paris … Officier de la Légion d’Honneur et chevalier de Saint-Louis, il reçut de Napoléon III le 12 août 1857 la médaille de Sainte-Hélène, portant la célèbre mention « A ses compagnons de gloire, sa dernière pensée le 5 mai 1821 » Il était également décoré de l’ordre de St Ferdinand d’Espagne.
Fantin des Odoards épousa le 20 février 1856 Hyacinthe Julie Josèphe Roelans.
Il mourut le 21 mai 1866, laissant d’intéressantes mémoires publiées après sa mort en 1895 et rééditées en 2009 chez Le livre chez vous : Journal du général Fantin des Odoards, étapes d’un officier de la grande armée 1800-1830. Son épouse lui survécut jusqu’en 1902.
Ses obsèques réunirent une foule compacte qui défila de l’église de Saint-Leu jusqu’au cimetière de Taverny. L’orphéon de St Leu menait le cortège, suivi des fanfares des sapeurs-pompiers des deux localités commandées pour St Leu par MM. Marcaillou capitaine, Lucien Pigny lieutenant et Imbert, sous-lieutenant, pour Taverny par MM. Morisset lieutenant et Hude sous-lieutenant. Les médaillés de Ste Hélène suivaient avec le clergé. Le cercueil était porté par les membres de la société de secours mutuels. Le conseil municipal de St Leu avait à sa tête M. Leduc, maire et M. Paris, adjoint. Pour Taverny étaient présents M Desfosses, maire et M. Langlois, adjoint.
Les dernières prières avaient été récitées par le curé du Plessis-Bouchard et un ami du général M. Maillard, officier d’académie, avait prononcé l’oraison funèbre dont voici un extrait :
L« …Militaire instruit, soldat philosophe, il avait parcouru les armes à la main toute l’Europe, depuis l’extrémité du Portugal jusqu’au cœur de la Russie, mettant à profit ses courts loisirs pour étudier la langue et les mœurs des peuples dont il foulait le territoire, et rapportant de ses excursions lointaines une moisson de souvenirs qui devait embellir sa longue existence. (…) Vous avez passé votre dernière revue, Général, et ce n’est pas celle dont vous devez être le moins fier. Maintenant reposez en paix au pied de notre vieille église, à l’abri des bois que vous aimiez, et vos restes mortels palpiteront encore lorsque dans les fêtes nationales, la voix du tambour, se mêlant aux chants sacrés, s’élèvera vers les espaces célestes du haut desquels votre belle âme plane dès aujourd’hui sur nous… »
A noter que l’oncle du général, Antoine-Etienne-Nicolas Fantin des Odoards (1738-1820), fut chanoine de la Sainte Chapelle de Paris. Emprisonné sous la Terreur bien que rallié aux idées révolutionnaires, il fit, après avoir été relevé de ses vœux par Pie VII, une carrière de publiciste et d’historien et écrivit notamment en 1798 une « Histoire de la République française depuis la séparation de la Convention nationale, jusqu’à la conclusion de la paix entre la France et l’empereur, pour faire suite à l’Histoire philosophique de la révolution de France. »
Extrait du journal de Fantin des Odoards sur la mort de Napoléon I :
« La fin de l’Empereur, que les feuilles publiques viennent de nous révéler, a été un coup de foudre pour tous ceux qui, comme moi, avaient dans leur fanatisme, fait un demi-dieu du héros qui a porté si loin et si haut la gloire du nom français. Il nous semblait que Napoléon était au-dessus de l’humanité, qu’il ne pouvait pas mourir, que son corps devait être impérissable comme son nom ; et il est mort ! Voilà le roi des rois couché dans un cercueil !
Ses yeux ne lanceront plus d’éclairs ; sa présence et sa voix n’électriseront plus les armées ; un mouvement des sourcils du moderne Jupiter n’ébranlera plus le monde. »
Sources :
Henry Caignard : St Leu la Forêt – Ed. Roudil 1970
Funérailles du Général Fantin des Odoards – Imp. Poitevin – 1866
Historique résumé du 22e régiment d’infanterie. (Montélimar 1893)